Prendre en compte la surdité ne va pas de soi. Une information détaillée est nécessaire pour en comprendre les enjeux. Le concept de surdité recouvre une multitude de situations distinctes et non-transposables. Les besoins et les moyens à mettre en œuvre sont donc spécifiques à chaque type de situation rencontrée (sourds, devenus sourds, malentendants).

Dans un premier temps, il importe par conséquent d’identifier clairement le type de déficience auditive et les moyens à mettre en place pour y pallier.

Il faut distinguer plusieurs cas de figure : pour les jeunes sourds de naissance différents modes d’éducation existent, certains sont axés sur l’apprentissage de la parole et de la lecture labiale, d’autres utilisent la langue des signes, généralement dans le cadre d’un bilinguisme.

Cependant, certaines situations sont similaires et dans tous les cas des aides facilitent la vie quotidienne :

  • des aides humaines lorsque cela est nécessaire (interprètes en langue des signes (LSF) ou codeurs-interprète en langage parlé complété (LPC) ;
  • l’utilisation de moyens auxiliaires tels que réveils lumineux ou vibrants, alarmes visuelles (remplaçant les sonnettes), sous-titrages à la télévision ou au cinéma, etc.

L’intégration d’un élève sourd ou malentendant avec des élèves entendants n’est pas gagnée d’avance. L’élève sourd peut éprouver des difficultés en milieu scolaire « ordinaire » et les élèves entendants ainsi que les enseignants doivent s’adapter graduellement à cette nouvelle situation.

Bien qu’il doive satisfaire aux mêmes exigences relatives au niveau d’acquisitions scolaires, l’élève sourd ou malentendant doit pouvoir bénéficier de mesures d’aménagement adaptées à sa déficience. Les conseils qui suivent ont été listés dans le but de faciliter la communication et par là-même d’améliorer les conditions d’intégration de part et d’autre. Ils n’ont pas de valeur « universelle » mais doivent être adaptés à la situation spécifique de chaque élève.

Contact visuel

  • Les élèves présentant une déficience auditive reçoivent les informations principalement par les yeux. Lors de la communication, la voie visuelle est par conséquent à privilégier.

Disposition en classe

  • Placez l’élève dans la classe de façon à ce qu’il puisse bien voir l’enseignant et/ou l’interprète/codeuse, si possible également les autres élèves. Lors d’une disposition traditionnelle des pupitres, il est important que l’élève soit placé au premier rang, le plus près possible de l’enseignant. Dès qu’un élève sourd appareillé et/ou implanté est éloigné de l’enseignant (à partir de 2-3 mètres), il entend déjà moins fort les paroles de celui-ci, à moins qu’il ne dispose d’un dispositif avec micro-cravate. Lorsque les tables sont disposées en U, il est important que l’élève soit placé au plus près de l’enseignant. S’il n’entend que d’une seule oreille, il faut veiller à le place du bon côté par rapport à l’enseignant.L’élève plus grand pourra indiquer lui-même à quelle place il entend le mieux, cela en fonction de plusieurs paramètres (réverbération du son, voisinage d’un camarade « bavard », etc.)

Audition

  • Souvent l’audition d’une personne malentendante est bien meilleure sur une oreille que sur l’autre. Essayez d’en tenir compte lors de la communication.

Manière de parler à un élève malentendant

  • Présentez votre visage face à la source de lumière, votre bouche doit être bien visible, placez-vous face à votre interlocuteur. Il est important de ne pas cacher votre bouche (par une main, par exemple) afin que l’élève puisse bien distinguer vos mimiques et les mouvements de vos lèvres. Évitez dans la mesure du possible de vous placer à contre-jour.
  • Parlez distinctement, à un rythme régulier et à voix normale, sans exagérer l’articulation, en restant naturel.
  • Employez des phrases claires, évitez les abréviations inconnues et les phrases à double sens et celles qui contiennent des éléments implicites.
  • Utilisez d’autres termes ou changez la forme de la phrase si vous n’avez pas été compris. Pensez à vérifier que l’élève vous a compris car il n’osera pas toujours vous faire répéter. Pensez qu’un élève sourd ne maîtrise pas toujours certains aspects du langage : le vocabulaire complexe, les différents registres de langage, l’implicite. Il peut avoir des lacunes dans ses connaissances du monde.
  • N’hésitez pas à utiliser de manière accrue la mimogestualité pour accompagner vos propos.

Utilisation de l’écrit

  • Écrivez les noms propres et les termes techniques lorsque ceux-ci sont employés pour la première fois.

Éléments à prendre en compte

  • Si nécessaire, faites signe à l’élève mal entendant pour l’inviter à fixer son attention sur vous.
  • Demandez aux autres élèves de la classe de s’exprimer chacun à son tour.
  • Éliminez ou diminuez les bruits de fond et évitez de parler dans le brouhaha.
  • Évitez, dans la mesure du possible, de parler en écrivant au tableau ou en marchant entre les rangs, l’élève ne pourrait alors pas voir votre visage.
  • Commentez ou explicitez si nécessaire les interventions ou événements qui se passent en dehors de son champ de vision.
  • Évitez dans la mesure du possible l’utilisation de supports auditifs (CD, cassettes, …). Si celle-ci s’avère indispensable, veuillez transmettre à l’élève (et à l’interprète ou au codeur-interprète, le cas échéant) le script du texte enregistré.
  • Favorisez l’utilisation de supports visuels dans vos cours (schémas, dessins, images…).

Prise de notes

  • Un élève sourd ou malentendant peut difficilement suivre le cours et prendre simultanément des notes par écrit, car il doit garder le contact visuel avec l’enseignant, l’interprète ou le codeur-interprète. Vous l’aiderez grandement, si vous lui transmettez, dans la mesure du possible, des documents de travail écrits : résumé du cours, photocopie de notes – éventuellement prises par un autre élève entendant, résumé du champ d’une épreuve, référence à des documents d’information sur Internet, etc.

Interprètes

  • La présence en cours d’un interprète en langue des signes français (LSF) ou codeur-euses en langage parlé complété (LPC) constitue une aide importante et souvent essentielle pour les élèves sourds, voire malentendants. Les besoins sont à évaluer en collaboration avec l’élève, ses parents, des partenaires spécialistes et la personnes de référence de votre école.
  • Si vous utilisez des supports visuels et/ou auditifs dans votre enseignement (textes, vidéos, CD, etc.), il est important que l’interprète ou le codeur-interprète puissent lire, visionner ou écouter ces documents avant leur utilisation en classe.

Cours d’appui

  • Si l’élève suit des cours d’appui en parallèle à votre enseignement, une étroite collaboration avec la personne responsable aiderait celle-ci à construire l’appui en connaissance de cause. Veuillez pour cela transmettre à votre collègue les documents essentiels pour information.

Collaboration avec les services spécialisés

Collaborations

  • L’intégration d’un élève malentendant ou sourd est organisée en collaboration avec les centres spécialisés de l’office médico-pédagogique (OMP, Centre de Montbrillant, Relais Surdité), d’autres services (Procom, l’AI, service d’aide à l’intégration d’A Capella (SAI), SAI, interprètes indépendants,…) ainsi que, dans la mesure du possible, des représentants de l’école fréquentée précédemment par l’élève.

Constitution de l’équipe d’enseignants

  • L’équipe des enseignants sera, pour le mieux, constituée sur la base de leur intérêt et leur engagement. Rappelons toutefois que les maîtres ne peuvent pas refuser d’enseigner à des élèves que leur confie la direction.
  • Avant la rentrée scolaire, une collaboration avec l’enseignement spécialisé pour la mise en place globale de l’intégration de l’élève sourd ou malentendant dans l’école est un atout (choix de la classe, effectif réduit, choix de l’enseignant, etc.)

Transmission des informations aux enseignants

  • Le répondant de l’école réunira les enseignants au début de l’année scolaire afin de leur transmettre toutes les informations utiles et de préciser les modalités d’aménagements mises en place. La présence d’un représentant du Centre de Montbrillant, le cas échéant également (Procom) ou du service d’aide à l’intégration d’A Capella (SAI), permettrait de donner des informations spécifiques au sujet de la surdité et des moyens pouvant être mis en œuvre. Une présentation de l’appui peut s’avérer très utile aux enseignants afin d’optimiser la collaboration. Une sensibilisation à la surdité « handicap partagé » peut être organisée par le Relais Surdité à l’attention des élèves et des enseignants, avec l’accord de l’élève concerné.

Transmission des Informations aux camarades de classe

  • Si l’élève donne son accord, la personne répondante de l’OMP peut également donner des informations utiles aux autres élèves de son groupe. Il est en effet primordial qu’ils soient informés de la déficience auditive de leur camarade et qu’il soient sensibilisés à la surdité et à la communication avec l’élève sourd ou malentendant. .
  • Il est également souhaitable que l’on explicite certaines mesures mises en place pour pallier la déficience (cursus scolaire aménagé, mesures portant sur les modalités de travail, etc.). Cette information pourra être donnée soit par le responsable du groupe soit par le répondant de l’intégration au sein de l’établissement.

Evaluation

Lors des évaluations, nous recommandons les adaptations suivantes pour l’élève sourd ou malentendant. Cependant, il est nécessaire de les évaluer et discuter au cas par cas, car chaque élève est différent. Ces adaptations doivent être élaborées dans le cadre d’une collaboration avec l’enseignant spécialisé et/ou l’interprète et/ou la codeuse-interprète, etc. :

  • Accorder un temps supplémentaire à l’élève car la lecture des consignes et la rédaction d’un texte peut lui demander plus de temps.
  • Adaptez les modes d’interrogation à l’élève sourd (la dictée par exemple pose problème car l’élève est défavorisé en raison de ses difficultés perceptives)
  • La présence de l’interprète en langue des signes ou du codeur-interprète en LPC est souhaitée pour les consignes, les questions posées par les élèves, les remarques supplémentaires de l’enseignant, etc. Si l’évaluation porte sur un texte ou un support audio ou vidéo, il est préférable que l’interprète ou le codeur-interprète ait pu prendre connaissances de ces supports au préalable.
  • S’assurer que l’élève a bien compris les consignes.
  • Lors de la correction, prendre en compte le fait que la formulation française peut-être approximative.
  • Dans le cas des élèves dont la langue des signes est le langue privilégiée, il est possible de demander à l’élève de signer sa réponse que l’interprète en langue de signe écrira pour lui (de manière fidèle et neutre) afin d’être sûr de tester ses connaissances sur le sujet et pas qu’il soit pénalisé parce qu’il n’arrive pas à formuler par écrit, en français, ce qu’il sait.
  • Il est utile que l’enseignant spécialisé connaisse le champ de l’évaluation afin qu’il puisse revoir avec lui les connaissances préalables nécessaires au bon déroulement de l’évaluation. L’enseignant spécialisé ne va pas travailler ce qui va être évalué en soit, mais il va s’assurer que l’élève ait toutes les autres connaissances nécessaires pour faire cette évaluation comme ses camarades.

Décisions prises en partenariat

  • Toutes les décisions importantes sont prises en partenariat lors d’une rencontre bilan qui réunira toutes les parties concernées, y compris l’élève et ses parents. Il est en effet essentiel que l’élève ainsi que tous les partenaires soient dûment informés des aménagements spécifiques mis en place, de leurs raisons et des conséquences éventuelles sur l’avenir scolaire et professionnel de l’élève.

Aménagements et suggestions pédagogiques

  • Les élèves sourds ou malentendants bénéficient d’aménagements définis selon leurs besoins spécifiques : temps supplémentaires pendant les évaluations, appuis, etc.
  • Selon la nature et l’ampleur des troubles auditifs, voire des troubles associés, il faut éventuellement prévoir un horaire aménagé. Il pourrait ainsi être nécessaire par exemple de répartir les cours du cursus scolaire sur cinq ans au lieu de quatre. Un tel aménagement permet à l’élève d’assimiler les connaissances nécessaires à une promotion tout en tenant compte des obstacles qui rendent l’apprentissage plus difficile. Cette mesure tiendra également compte de la fatigue liée aux conditions d’apprentissage plus difficiles.

Suggestions pédagogiques